Dans le fragment 94, Blaise Pascal livre une réflexion sur la relation qu’entretiennent justice et force. Voici en citations successives le texte originel, accompagnées d’un commentaire littéral du fragment, particulièrement instructif pour ceux qui s’intéressent au thème de la justice.
Justice, force.
Il est juste que ce qui est juste soit suivi ; il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi.
Ce qui est juste est en l’occurence suivi librement, par le choix de notre conscience. Tandis que ce qui est le plus fort est suivi par contrainte, sans possibilité de s’y soustraire.
→ Le temps dans la pensée de Blaise Pascal
La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique.
La justice a besoin de la force pour s’appliquer, pour être rendue : dans nos sociétés, l’état, le système judiciaire et ses institutions sont une force. S’il y a emploi de la force sans souci de justice, il s’agit d’une tyrannie : un état qui use de sa force sans justice est tyrannique.
La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants. La force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force, et pour cela faire que ce qui est juste soit fort ou que ce qui est fort soit juste.
La force est une nécessité pour garantir la justice, car il y aura toujours des hommes pour s’opposer à cette justice. Ces opposants à la justice ne peuvent être arrêtés qu’avec la force. Il y aura toujours des hommes pour contester une force sans justice. Il faut donc avoir à la fois force et justice en même temps.
La justice est sujette à dispute. La force est très reconnaissable et sans dispute. Aussi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit qu’elle était injuste, et a dit que c’était elle qui était juste.
→ La nécessité de se faire justice – Victor Hugo
La justice peut être discutée, débattue, tandis que la force s’impose indiscutablement. Aussi la force a-t-elle surpassé la justice, elle s’est imposée à elle.
Et ainsi, ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste.
La force s’étant imposée, le seul moyen était de rendre cette force installée juste, que la force soit juste.
→ Culture générale : les Révolutions
→ Culture générale : la Justice