L’intitulé complet du sujet qui a été posé aux candidats lors du concours commun 2021 pour intégrer les Instituts d’études politiques de région était :
« A la lumière de vos références historiques, culturelles ou artistiques, pensez-vous que les révolutions font table rase du passé ? »
Puisque le thème des Révolutions devrait être renouvelé pour l’année prochaine, nous avons voulu fournir une correction plus complète que celle du sujet qui s’intéressait au secret : Corrigés : est-il encore possible de préserver le secret aujourd’hui ?
Cette fois-ci, le sujet d’entraînement qui se rapprochait le plus était sans doute : « Les révolutions sont-elles la condition du progrès ? », notamment parce qu’il confrontait les révolutions au temps long et à l’Histoire. Vous aviez été nombreux à proposer vos idées pour ce sujet d’entraînement, qui était également celui que nous avions choisi pour notre Méthode en Questions contemporaines. Cela tombait donc plutôt bien, et nous espérons que cela a pu vous être utile !
La correction Intégrer Sciences Po : les révolutions font-elles table rase du passé ?
Comme pour tout sujet, il n’y a pas qu’une solution possible. Nous vous proposons donc une façon de traiter le sujet qui aurait fonctionné, mais si vous avez fait différemment, c’est peut-être tout aussi bien voire mieux !
Corrigé de l’introduction
Accroche : Au XVIIe siècle, les Anciens parmi lesquels il faut nommer La Bruyère, Boileau, et La Fontaine, défendaient l’idée que c’est le passé qui confère aux œuvres leur prestige. Une œuvre contemporaine peut bien elle aussi être pleine de qualités, mais c’est uniquement en lien avec le passé qu’elle devient illustre.
Contre-accroche : À l’inverse, les Modernes comme Perrault et Fontenelle revendiquent une rupture avec le passé. C’est en effet par des œuvres totalement neuves, qui surpassent le passé, que les créations peuvent acquérir leur prestige et leur excellence.
Faire émerger le paradoxe : Dans cette querelle des Anciens et des Modernes, il est finalement question de l’intérêt de faire rupture, de l’opportunité qui existe à se servir d’un certain héritage, ou plutôt à viser une création entièrement moderne, sans s’enchaîner à ce passé. Mais davantage encore, que cela soit désirable ou non, est-ce toutefois possible ? N’est-il pas dans la nature même des révolutions, qu’elles soient littéraires, culturelles, historiques, politiques, symboliques, scientifiques, de détruire le passé pour créer le présent et son futur ?
Définitions : Cette réflexion rejoint les ambiguïtés issues de la multiplicité de définitions autour du mot révolution : Définitions des Révolutions, [développer ici toutes les définitions, en particulier dans le domaine astronomique, pour montrer clairement que le paradoxe du sujet se trouve déjà dans le mot lui-même]. Faire table rase, c’est recommencer à zéro, et n’avoir que faire de ce qui existait jusqu’à présent, pour tout rebâtir à neuf. La notion de tabula rasa, même si elle se distingue de l’expression faire table rase, conserve une connotation philosophique, ce papier vierge ou papier blanc étant le symbole de doctrines philosophiques variées depuis Aristote jusqu’à Kant.
Problématique : Si les révolutions constituent par définition un renouveau du système existant, échappent-elles parfaitement à ce passé duquel elles veulent rompre ? Comment les révolutions peuvent-elles s’arracher au passé pour ne plus être réaction, mais authentique nouveauté ? Dans quelle mesure les révolutions peuvent-elles s’émanciper de ce qui les produit ?
Annonce du plan : [voir ci-dessous]
Corrigé du développement
I. L’aspiration à faire table rase au moyen d’une révolution…
A. La volonté de rompre avec le passé
« La Révolution française, en faisant table rase des institutions du passé, en ne laissant subsister en face l’un de l’autre que l’individu et l’État, se donna la tâche difficile de tout créer à nouveau sur le modèle de la pure logique. » Ernest Renan, Questions contemporaines, 1868
B. L’impératif de faire table rase
« Il faut être absolument moderne » Rimbaud, avril-août, 1873.
Histoire des révolutions.
II. … ne peut jamais parfaitement se défaire du passé
A. Contre une naïveté idéaliste, le matérialisme de Marx et Engels
« Chaque génération continue donc, d’une part le mode d’activité qui lui est transmis, mais dans des circonstances radicalement transformées et d’autre part elle modifie les anciennes circonstances en se livrant à une activité radicalement différente ; ces faits on arrive à les dénaturer par la spéculation en faisant de l’histoire récente le but de l’histoire antérieure : c’est ainsi par exemple qu’on prête à la découverte de l’Amérique cette fin : aider la Révolution française à éclater. » Marx et Engels, L’Idéologie allemande, 1846
B. L’homme ne peut se réinventer totalement
« Dieu a marqué les esprits des hommes de certains caractères, qui, comme les défauts de leurs corps, peuvent être légèrement amendés, mais qu’on ne saurait entièrement réformer et changer en caractères tout contraires. » Locke
III. … mais peut s’en servir pour créer du neuf
A. C’est en s’appuyant sur le passé que les révolutions permettent de progresser
« Nous sommes comme des nains assis sur des épaules de géants. Si nous voyons plus de choses et plus lointaines qu’eux, ce n’est pas à cause de la perspicacité de notre vue, ni de notre grandeur, c’est parce que nous sommes élevés par eux. » Bernard de Chartres
La Structure des révolutions scientifiques de Thomas S. Kuhn en 1962.
B. Les révolutions ne déterminent pas à elles-seules le futur
« Un des grands vices de l’histoire est qu’elle peint beaucoup plus les hommes par leurs mauvais côtés que par les bons ; comme elle n’est intéressante que par les révolutions, les catastrophes, tant qu’un peuple croît et prospère dans le calme d’un paisible gouvernement, elle n’en dit rien. » écrit Jean-Jacques Rousseau dans le livre IV de son ouvrage Émile, ou De l’éducation.
Vos idées : les révolutions font-elles table rase du passé ?
[wpdiscuz-feedback id= »6bwdjwg7hx » question= »Quelles sont vos idées pour ce sujet des révolutions ? » opened= »0″]C’est maintenant votre tour de proposer de nouvelles idées pour traiter le sujet.[/wpdiscuz-feedback]Le sujet demandait beaucoup de précision, la question étant plutôt pointue. C’était sans doute la principale difficulté, mais peut-être que d’autres aspects ont pu vous gêner ? Aussi bien sur le fond du problème que sur les conditions de l’examen, comment vous en êtes-vous sorti ?
En tout, près d’une centaine de commentaires avaient déjà été postés pour nos sujets d’entraînement sur le thème des Révolutions, ce sont autant de pistes qui enrichissent la présente correction. Merci à vous de la compléter, non seulement pour vous-même, mais aussi pour les candidats qui se confronteront eux aussi aux concours Sciences Po dans les années à venir.
En attendant vos réactions, nous voulons insister sur le fait qu’il ne sert à rien de vous tourmenter sur la note que vous allez recevoir. Il vaut mieux attendre patiemment votre note, faire ce débriefing que nous vous proposons pour que cette épreuve ait servi à quelque chose dans tous les cas, et vous verrez bien le jour des résultats si le correcteur a apprécié votre copie. Il y a toujours des surprises dans les résultats !
Une de ces surprises nous devons l’avouer, consiste bien souvent en une claque monumentale, mais qui est le lot de très nombreux étudiant — rappelons que vous êtes 14 000 candidats, pour exactement 1147 places proposées l’année dernière. C’est donc évident qu’il y aura des déceptions. En revanche, la différence résidera dans votre réaction, que faire de ces résultats ? S’ils sont positifs, c’est évidemment parfait. S’ils sont négatifs, est-ce bien nécessaire de s’en vouloir ou de se dévaloriser ? Pourquoi pas voir cette expérience comme une motivation à travailler encore plus fort, et retenter votre chance l’année prochaine ou plus tard ?
Il existe de nombreuses possibilités pour intégrer Sciences Po, et pas seulement qu’après le bac, une bonne partie pourra retenter sa chance l’année prochaine, ou dans des concours pour une entrée directe en 2A dans certains IEP, ou encore les concours du niveau master, voire… totalement ailleurs. Alors souriez jusqu’aux résultats, prenez-les pour ce qu’ils sont, un concours extrêmement compétitif et aux critères imparfaits, et surtout profitez de la vie et continuez vos études avec encore plus de force !
Merci pour votre réponse
Bonjour,
Pouvez-vous me dire si j’ai bien compris : L’épreuve d’histoire a été annulée en 2021 pour le concours commun et pas les questions contemporaines ? Pourquoi ? Merci par avance pour votre réponse.
Bonjour,
Vous avez bien compris, l’épreuve d’histoire a été annulée l’année dernière, tandis que l’épreuve de questions contemporaines a été maintenue.
Cela était dû à des raisons logistiques. Les épreuves ont été organisées en ligne en considération du contexte sanitaire.
La direction du concours commun aux IEP de région a préféré ne retenir que la seule épreuve de questions contemporaines, qui est entièrement spécifique aux IEP et ont fait l’objet d’une préparation des candidats uniquement en vue du concours des IEP.
Cordialement,
L’équipe Intégrer Sciences Po
Bonjour, l’équipe intégrer science po je sais que ce que je vais vous demander n’arien à voir mais voilà jusqu’ici vous m’avez toujours donné de bons conseils, alors voici ma situation je suis en terminal en spécialité histoire et le 5 mai j’ ai une dissertation sur la patrimoine, donc voici mes chapitres : chapitre 1 » les usages sociaux et politiques du patrimoine », chapitre 2 « la préservation du patrimoine entre tensions et concurrences » et enfin chapitre 3 c’est un travail conclusif sur le patrimoine français » la France et son patrimoine, des actions majeures de valorisation et de protection » Donc je souhaite m’entraîner sur de nombreux sujets comme pour le concours donc j’ aimerai savoir si vous ou quelqu’un d’autre dans la même spécialité que moi avait quelques sujets à me proposer. Merci
Bonjour, excusez moi de vous déranger mais j’ai pris ce sujet au concours et je voulais savoir si vous pouviez me dire si mon plan est bien ou si au contraire j’ai vraiment raté ma dissertation.
Pour la problématique j’ai mis : » En quoi les révolutions sont-elles un moyen de construire un avenir convenable alors même que celles-ci puisent leurs ressources dans un passé douloureux? «
Pour le plan:
I)Le passé est souvent source de conflit, ce qui favorise la naissance de révolutions et pousse à réformer la société
A) les frustrations du passé s’accumulent sur le long terme et mène à un début de révolution ( qui aboutit ou non), de ce fait les révolutions doivent faire table rase du passé. ex: La révolution Tunisienne.
B) Mais pour que la révolution fasse réellement table rase du passé, il faut qu’elle ait déjà des idées/ réformes à apporter afin de changer le pays. Ex: Utopia de Thomas More puisque des idées sont pensées afin de créer une société » parfaite », ce qui en quelque sorte constitue une rupture avec le passé).
II) une grande partie des révolutions aboutissent à un changement radical qui diffère du passé ce qui commence par un bouleversement politique
A) Les changements radicaux, qui diffèrent du passé commencent souvent par un changement politique qui permet de penser une nouvelle société. (ex: révolution française) .
B) Les révolutions technologiques et numériques aboutissent également à un changement politique qui permet de changer toute la société. ( ex: hacheurs, les Anonymous)
III) ce n’est pas l’objectif de toutes les révolutions de faire table rase du passé, et cette réconciliation avec le passé n’est jamais acquise.
A) Certaines révolutions ont pour objectif de retourner à un ordre ancien ( ex: les nazis)
B) Les changements radicaux acquis grâce aux révolutions ne sont jamais acquis pour toujours ( ex: régime de vichy qui après la révolution française installe une sorte de dictature en France)
Merci d’avance, bonne journée
Bonjour,
Je me demandais si il était possible de dire dans l’introduction qu’on allait exclure l’ensemble des Révolutions pour ne garder que la révolution politique ? (tout en expliquant que selon Jacques Ellul ou Ludivine Bantigny user du terme de Révolution pour qualifier des événements non politiques participe à la banalisation de la Révolution et donc à sa mort)
Ça ne risque pas de faire prétentieux où de me coûter des points en termes d’analyse des termes du sujet ?
bonne journée
Bonjour Loui,
Ta question et le cas que tu soulèves sont très intéressants.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles cela ne devrait pas être pénalisé : après tout, tu candidates pour une école de sciences politiques ; il est légitime et possible de se consacrer à une seule interprétation, à la condition de s’en expliquer, ce que tu sembles avoir fait ; cela montre de l’assurance et que tu es lucide et conscient quant à tes choix, bref l’engagement peut être valorisé.
Il y a néanmoins plusieurs raisons pour lesquelles cela pourrait être pénalisé : il est rare que les IEP choisissent un thème au pluriel, c’est ainsi que bien souvent on parle de « la science », « la justice », « la religion », « le secret », et donc quand un thème est annoncé au pluriel plutôt qu’au singulier, c’est souvent volontaire (le thème était bien les Révolutions plutôt que la Révolution) ; la question proposait de s’appuyer sur des références diverses « historiques, culturelles ou artistiques », et donc n’en prendre qu’un seul aspect, en l’occurrence l’aspect politique, pourrait paraître arbitraire.
Nous pensons donc cela dépendra d’abord de ta justification dans l’introduction, puis tout simplement de ton développement, notamment si avec l’aspect politique tu as déjà eu tellement de choses à dire qu’effectivement ce n’était pas la peine ou en tout cas pas possible matériellement de tout explorer.
C’est donc un pari très intéressant que tu as fait, et nous espérons qu’il sera réussi !
Bonne journée,
L’équipe Intégrer Sciences Po
Bonjour,
Merci beaucoup pour la réponse, en réalité pour être précis je n’ai pas passé le concours 1A, je me suis inscrit pour le concours 2A (le 5 juin) mais j’essaye d’imaginer des plans types comme entrainement 🙂 et disons que sur ce sujet en particulier je pense que je l’aurais fait comme ça
Effectivement vu comme ça ça semble être un pari assez risqué, mais je note qu’il faut vraiment que je m’applique dans l’introduction et éviter toute superficialité.
Bonne journée !
D’accord merci j’ ai une dernière question quand est ce que que l’on saura si on pris ou non pour intégrer un IEP ?
Ces dates seront communiquées prochainement,
Bonne journée,
Excusez moi de vous déranger mais à partir de combien de moyenne générale, peut on considérer que notre dossier scolaire est « bon », « très bon », excellent » ? Je pose aussi la même question avec les moyennes de nos spécialités et du bac de français ? Merci d’ avance
Bonjour,
Puisqu’il s’agit d’un concours, il ne peut pas vraiment être donné de critères précis. Un dossier scolaire sera jugé très bon, voire excellent, en fonction des 13369 autres candidats qui prétendent à l’admission comme toi. Du fait des modalités exceptionnelles du concours cette année, il serait impossible de donner une fourchette assez stricte pour que cela soit utile puisqu’il n’y a aucun antécédent. Il faudra vraiment patienter.
Bonne journée,